Louise BROUSSOUS (2 février 2019)


Louise, le jour de ses 100 ans
Louise, le jour de ses 100 ans

Nous avons le regret de vous faire part du décès de madame Louise BROUSSOUS, le 2 février 2019.

Louise était notre doyenne depuis quelques années. Elle avait 106 ans. Elle était une personne charmante et toujours élégante pour nous recevoir.

La photo jointe a été prise pour ses 100 ans. Nous lui avions fait une petite fête.

Dans le dernier bulletin, nous avons publié une lettre de son mari écrite à ses parents le 11 novembre 1918 alors qu’il est au front et apprend l’armistice. Il était célibataire à l’époque.

Les obsèques ont été célébrées le 6 février en l’église de Saint Cléophas, à Montpellier.


Éloges de madame Louise BROUSSOUS

par sa famille le 6 février en l’église Saint Cléophas de Montpellier

 

Notre Mère s'en va ; aujourd'hui plus que jamais nous prenons conscience de ce qu'elle était pour nous. L'avoir à nos côtés, même affaiblie, nous paraissait chose naturelle et normale. Ce n'est qu'avec son départ que nous mesurons le vide créé par la séparation.

Dans la simplicité du quotidien Louise était une femme de conviction et de devoir. Épouse aimante et fidèle, mère affectueuse et attentionnée, elle reste pour nous un exemple. À ses enfants (Geneviève et moi, Francis) elle a beaucoup donné : la Vie d'abord bien sûr, mais également et surtout son affection, sa protection, son Amour.

Ce que nous sommes, pour l'essentiel, c'est à Louise notre mère, à Sylvain notre père que nous le devons. Lui c'était la rigueur militaire, l'autorité. Elle c'était la compréhension et la bienveillance. Une compréhension à toute épreuve, une bienveillance apaisante qui excluait cependant tout laxisme, une bienveillance capable de fermeté tranquille qui accompagne le véritable Amour.

Louise était généreuse, par nature et par éducation. Pour les siens elle se serait démunie et privée sans condition. Mais témoin d'une époque révolue, celle de l'entre-deux-guerres, souvent difficile pour les gens modestes en raison des restrictions du quotidien, il fallait être économe et prévoyant. Notre mère l'était, la dépense n'avait de sens que si elle était vertueuse et justifiée par l'utilité de la chose.

De cette même époque où la médecine n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui, où la mortalité par maladie infectieuse était encore grande, notre Mère avait hérité d'un sens aigu de l'hygiène et de la propreté à tel point que ses petites filles l'appelaient "Mamie Javel" ; elles en conservent quelques fameuses et "fumeuses" anecdotes.

Élevée dans la religion catholique elle a, toute sa vie, témoigné de sa foi en Dieu. Elle n'en était pas moins réservée sur certaines positions officielles qui ne lui semblaient pas suffisamment novatrices. En fait sa foi était celle d'une femme libre, qui ne pouvait se résoudre à subordonner le bon sens aux idéologies. Ses valeurs étaient plus celles d'un humanisme chrétien au service des autres qu'une soumission aveugle aux dogmes. Conséquence ou disposition innée? Elle ne supportait pas l'injustice et savait le dire. Elle était sensible au malheur de son entourage. Toute atteinte à la dignité humaine l'affligeait. Sans être féministe, elle aimait la modernité et avait un petit côté rebelle contre les immobilismes et les conservatismes appuyés qui refusaient toute évolution.

À la maison de retraite tout le monde - pensionnaire et personnel soignant - trouvait la centenaire agréable et jolie. C'est vrai qu'avec ses grands yeux bleus, son regard lumineux et ses cheveux blancs elle était belle. De cette reconnaissance, elle même s'en étonnait. "On ne me disait jamais que j'étais belle quand j'étais jeune et maintenant alors que je suis vieille on n'arrête pas de me le dire". Pourtant, belle, elle l'a toujours été, les vieilles photos de famille en témoignent, mais de son temps, avec une éducation stricte, l'éloge n'était pas de mise. 

Elle nous disait parfois : "Ce que j'ai réussi de mieux et qui m'apporte le plus de Joie, ce dont je suis la plus fière, ce sont mes enfants". Quelle grâce d'être ainsi encouragés et valorisés !

Au fil du temps elle nous déclarait encore : "Ce qui me fait le plus de peine ce n'est pas de vieillir, c'est de vous voir devenir vieux"... Son âge avancé lui donnait l'occasion de le répéter. 

Notre mère s'en va et pour autant elle ne nous quitte pas, elle chemine à nos côtés, toujours présente dans nos cœurs. Ses valeurs, qui sont aussi les nôtres, ne passeront pas. À nous ses enfants, petits et arrières-petits enfants de les cultiver et de les transmettre.

Maman, ton sourire va nous manquer.

Lu par son fils Francis

 


 

Louise BROUSSOUS, née Louise MICHEL, a vu le jour le 15 septembre 1912 à "Joannas", petit village de l'Ardèche, dans une famille de modestes agriculteurs.

Alors qu'elle n'avait que deux ans (sa sœur aînée en avait alors 6), son père est mobilisé pour partir à la guerre de 1914-1918 ; il n'en reviendra pas, ”tué à l'ennemi”, laissant une veuve de 28 ans et deux jeunes enfants.

À l'âge de 7 ans, elle entre en pension à l'école de la Sainte-Famille à Montpellier où sa mère a trouvé un emploi de cuisinière ; elle y mène la vie un peu sévère des pensionnaires de cette époque, austérité toutefois tempérée par la proche présence de sa mère et de sa sœur. Elle y reçoit une solide formation religieuse et morale. Après l'obtention du certificat d'étude primaire elle est contrainte à 14 ans d'abandonner à regret des études qu'elle aimait pour un apprentissage de couturière, profession qu'elle exercera jusqu'à son mariage.

Malgré l'absence du père, les restrictions et les difficultés de cette époque, elle garde le souvenir d'une jeunesse néanmoins heureuse en raison de l'affection protectrice de sa mère et de sa sœur.

Elle a vingt ans lorsqu'elle fait la connaissance de Sylvain, un militaire de 14 ans son aîné, qui rentre en métropole après avoir servi outre-mer, dans le sud algérien d'abord puis en Indochine. Ils se marieront deux ans plus tard, le 4 août 1934. De cette union naîtront deux enfants : Geneviève en 1935  et Francis en 1944. Par la suite elle connaîtra la joie d'être trois fois grand-mère et deux fois arrière-grand-mère.

Son mariage la conduit à mener la vie d'une femme de militaire allant de garnison en garnison au gré des affectations de son mari, lieutenant greffier au tribunal militaire. C'est ainsi qu'elle résidera successivement à Paris, puis en Touraine et Montpellier où elle revivra l'angoisse de la guerre, celle de 39-45, avant de connaître une période plus sereine et confortable, celle de l'occupation en Allemagne par les forces françaises de 1945 à 1955.

De retour en France en 1955, ils reviennent s'installer à Montpellier, quartier de la ”Caserne Lepic”. Sa sœur Maria habite à côté. Ils passent leurs étés à Cénomes, en Aveyron, berceau de la famille Broussous, où les petites-filles les rejoignent pour les vacances. Sylvain son mari décèdera en juin 1986 ; sa sœur une dizaine d'années plus tard. Sa fille Geneviève a emménagé dans le voisinage avec son époux. En mars 2001, Louise entre à la maison de retraite Jean Péridier ; elle était alors âgée de 89 ans.

Elle y résidera 17 ans jusqu'à son décès le samedi 2 février 2019, entourée par sa famille, ses amis qui lui rendaient visite et la présence quasi-quotidienne de sa fille Geneviève. Années paisibles au début, rendues plus difficiles au fil du temps par la dégradation progressive de son état de santé.

Nous remercions sincèrement tous ceux qui l'ont accompagnée dans ce parcours de fin de vie, en priorité le personnel, la direction, les animatrices zélées et bienveillantes, les amis résidents, sans oublier tous les bénévoles des diverses associations qui intervenaient ponctuellement (ANOCR 34 présidée par le colonel GRADIT, retraités et veuves d'anciens combattants, l'association VMEH de Paul et Mimi AUGER, les prêtres et les bénévoles de la Paroisse Saint Cléophas).

Christel, l’ainée de ses petits-enfants

 


 

Le témoignage des petits et arrière-petits-enfants

 

(Lu par Christel, l'ainée des petits-enfants)

Chère mamie Louise,

Sophie, Corine et moi, quelle chance, quelle joie, quelle fierté de t’avoir eue comme mamie.

Nos amis d’enfance, qui partagent aujourd’hui notre peine, peuvent en témoigner.

Toujours de notre côté. Une mamie aimante, protectrice, intelligente et drôle. Élégante, coquette. Soucieuse aussi de la morale et des conventions.

Il fallait se tenir bien, s’insérer comme il faut, assurer nos arrières. Mais ton amour inconditionnel nous portait. Ton côté fusionnel nous rassurait.

Moderne, tu t’intéressais à tout. À nos amours, à nos métiers, à nos opinions. Et aussi à la politique, la religion, la poésie et la grande marche du monde. Quand tu étais à la maison de retraite, que tu ne sortais presque plus, tu t’informais quotidiennement de l’actualité et des transformations de la ville.

Tu savais parler de ta vie passée sans tabou.

Malgré des décennies, des générations d’écart, nous avons partagé avec toi des heures de confidences.

 

(Lu par Sophie la cadette des petits enfants)

Nous, tes petites filles, nous étions tes petites protégées, "les plus merveilleuses" à tes yeux. Et toi tu étais notre "Mamie Poule" qui avait du mal à croire que nos compagnons de vie seraient à notre hauteur ! Tu ne pouvais pas t'empêcher de faire promettre à David à chaque visite de bien s'occuper de moi et de réaliser la chance qu’il avait.

Et puis, à 95 ans, tu es devenue arrière-grand-mère. Quelle émotion pour nous tous lorsque tu as pris ce bébé dans tes bras la première fois ; je retrouvais les mêmes bras enveloppants, les mêmes comptines, le même Amour que pour nous. Tu étais tellement heureuse de voir Ethan et Charlie, ces 2 petites boules d'énergie venir jouer au ballon dans le jardin de la résidence et te réclamer un chocolat. Ton visage était tellement lumineux, et tes yeux bleus souriaient aux éclats.

 

(Ethan, 11 ans, l'ainé des arrière-petits-enfants)

Grand-mamie,

Pour tes 100 ans, nous avons fait la plus belle des fêtes. Une terrasse fleurie, le soleil de Tressan, des bulles de champagne, une belle robe et le son du phonographe qui nous a fait valser. Le même phonographe qui vous faisait danser toi et Sylvain, point de départ de votre rencontre, de votre mariage et de cette belle page familiale que vous avez écrite.

 

(Sophie à nouveau)

Chère Grand Mamie, il y a 2 ans ton esprit s'était déjà partiellement envolé, mais tu t'accrochais à la vie, comme si ton instinct protecteur te retenait de nous quitter. Mais tu peux partir tranquille, nous avons la certitude que tu continueras à veiller sur nous, quand nous, nous continuerons à te faire vivre dans nos cœurs.

 

(Charlie, 5 ans, le plus jeune des arrière-petits-enfants)

Grand-mamie,

Quand je serai devant Dieu, je ferai une petite prière pour toi.